La dernière image
.... Puis-je vous faire un aveu ? Je ne suis pas assez solide pour le
clamer haut et fort, mais je peux vous le murmurer, m’en réjouissant en mon for
intérieur…
....Alors voilà : depuis deux ou trois jours, je me sens mieux. Pas au
plus haut de ma forme — je ne suis d’ailleurs pas sûr de recouvrer mon
optimisme d’avant, ni la vivacité de ma révolte — mais je sens qu’il se passe
quelque chose. La photo de mon fils en allé, placée en évidence devant ma table
de travail, cesse de me foutre en l’air chaque fois que j’y porte les yeux.
....Une nouvelle fois, je viens de croiser son regard. Sa lumière m’a giflé
sans me brouiller la vue, je le vois qui me fixe de là où il n’est plus…
J’aimerais le prendre dans mes bras, lui dire combien sa voix me manque.
....J’aimerais qu’il me prenne contre lui et qu’il me réconforte. Je
fermerais les yeux, je me laisserais faire.
....Avouer cela est une épreuve ? C'est plutôt une caresse, et je
reste debout .
....Je resterai ainsi malgré que le matin, à mon réveil, la position qui est alors la mienne (la position du gisant) me ramène en esprit à la dernière image qu’il m’a laissé de lui.
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