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18 août 2008

Glamour ? A peine moins…

miro_Bathing_Woman
Juan Miro - Bathing Woman

    — Clarisse…? Mais la cousine s’est endormie ou fait encore semblant, cette folle du Tibet. Et dort entre elles leur mari, leur amant. Par la porte-fenêtre pénètre la douceur nocturne, ils sont nus tous les trois… Lui si beau, si fort, et si belle cette semblable en sa chevelure en vrac et ses bras étalés, et elle si heureuse, si jeune, si souple … Elle se laisse retomber dans les souvenirs du jour, des souvenir de terreur à en mourir de rire, à se les repasser sans jamais s'arrêter, dans cette contrée de portiques et d’asperges.
D’abord elle a eu mal, à cause de la grosseur de son amant et de son étroitesse à elle, mais Clarisse était là qui lui tenait la main, et cela n’a pas duré. Il s’est introduit lentement comme ouvrant une chapelle, puis il n’a plus bougé, et l’a laissée se faire à cette raideur qu’il maintenait en elle et qui l’épousait toute, sa puissance de mâle, sa tendresse, et la douceur dont il fit preuve en commençant à se mouvoir en elle, lentement, la regardant l’aimer…

    Elle voudrait le sentir en elle, qu’il la reprît et qu'il reprît Clarisse, si bouleversante en son plaisir… Elle lève une jambe dans la clarté de la lune, l'admire en son délié, puis elle élève l'autre et l'admire tout pareil, les plie, les croise, les désunit et les laisse retomber, glisse à nouveau la main vers cette nudité nouvelle qu'elle a pu découvrir enfin. Quelques frisettes et plus rien par-dessous, rien que la vérité d’un sexe qu'on dessinait d’un doigt, comme ceci, dans un sens et dans l'autre, l'ouvrant et se glissant dedans, oh oui, puis toute entière dans la paume transalpine, comme ceci, et la main italienne sur le minou fêté, le minou contemplé, le minou honoré de la langue et du nez mais pas moyen toute seule, oh mon amour de la nuit de Sologne…

    Prends-moi et reprends ma cousine, je te la prête, elle l'a bien mérité. Sans elle… restée en ma désolation serais-je, abandonnée sur le bord d’un chemin où nul carrosse ne passe, jetée dans quelque asile de folles et toi désespéré là-bas, hurlant un amour noir au milieu des décors…

    Laquelle de nous deux préfères-tu, mon coquin, mon pirate : la du Boissy de Marigault, allongée à ta droite et déjà dans les limbes, ou bien la Garancière Judith, éveillée à ta gauche ? Pas de particule celle-là mais vingt ans depuis six heures et l'avenir devant elle, et l’avenir à ton bras si tu veux bien l’emmener où tu voudras aller, et qu’elle te reçoive chaque fois que l’envie t’en viendra. En plus d’être roulée comme peu d’actrices le sont, d’accord, Clarisse est une femme de tête, je l’avoue d’autant plus volontiers qu’elle m’a sauvée de Freud et branchée sur l’amour, le vrai, celui qui vous foudroie. Elle a un regard à tomber à genoux, une bouche à assoiffer un moine, je le sais pour l'avoir embrassée ce matin dans les bois, sans parler du moelleux de sa gorge ni de son popotin de reine, ni de la hauteur de sa philosophie… Mais te voici gisant, mon vainqueur, brisé par les honneurs rendus à deux jeunes femmes, elle épuisée par le tracas de mon éducation, endormie elle aussi mais je veille sur vous — folle amoureuse de vos personnes à en rire et pleurer, à me promener sans rien dans vos jardins secrets, à me hisser sans pantalon ni rien, rien que mon cresson au vent ou plus de cresson du tout vers les hauteurs d’où vous me ferez signe. Toi ma Clarisse en cette soie flottant sur ta beauté, toi mon Amadeo avec ce ruban, ce ruban que je glisse à ton membre, …ton membre… délicatement pour ne pas t’éveiller, puis je que j’amène sur cet oiseau, t que je noue à son cou pour qu’il ne prenne pas froid, mais sans serrer de peur de l’étrangler, juste le nécessaire pour éviter qu’il ne se défasse et ne tombe
— je veux dire le ruban.

    Je ne ris pas, je t’assure. Et je ne ferai plus la folle sans votre assentiment, je vous le jure à tous les deux. Assagie désormais, jambes croisées comme ceci, jambes disjointes mais à peine, ou plutôt si, l'une de biais, l'autre pliée de façon que le pied de celle-ci trouve un appui sur le genou de celle-là, et me voici à mon tour m’endormant, poétesse comblée entre vos deux sommeils, mes yeux comme ceux d'une chatte, mes petits seins à portée de vos lèvres, de vos mains agaceuses.

    — Tu ne dors pas ?

    Redressée, Clarisse découvre une Judith en désordre étendue sur le dos, un bras par dessus tête et les jambes disjointes, en total abandon à des émois que l’on devine. Elles se regardent, elles se mesurent au travers d'une nuit qui les teinte de rouge et les transporte ailleurs, dans une contrée où la raison se perd.

    — Tu rêves ?

    Clarisse est retombée, Judith sur un coude à présent la contemple, si belle en sa langueur. L'une brune et l'autre blonde, entre elles leur amant, adorateur de leurs charmes contraires, dispensateur de leurs plaisirs semblables… Un homme grand et svelte, et blanc de travailler loin d'elles, la peau teintée de cuivre dans cette chambre ouverte à la clarté lunaire et au chant de la chouette, qui respire tranquillement… Elle le caresse, sans l’éveiller le tourne sur le dos, pose les lèvres sur l’oiseau.

    — Ma fée, s’il te plaît… pourquoi a-t-il voulu deux femmes ?

    Le regard de Clarisse à l’autre extrémité de la nuit, et sa réponse, venue de mille années-lumière : que c'est un homme inquiet, qu’il a besoin des femmes, besoin de leur amour.

    — Nous le protégeons de la mort, ma chérie, n’avais-tu pas deviné ?

    Judith regarde sa cousine, regarde son amant, voit disparaître à la lueur des bougies la silhouette égarée qu’elle était autrefois, puis se former l’image d'une jeune femme adulte, responsable en toutes choses encore que titillant les hommes, les recueillant en elle… Mais n’est-ce pas là la seule façon qu’on a de les aimer ? Elle se laisse retomber, s'inquiète une dernière fois de la taille du ruban, et la voici qui se prend à sourire à cette réalité nouvelle — son amant assoupi auprès d’elle — et qui garde ce sourire sur son visage de petite fille comblée, tombée sous le poids des pollens dans la nuit de Sologne.

   

Judith - extrait.

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Commentaires
F
J'avais compris, grand fou !
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M
>>> Fanzesca, voyons, tes frites, je plaisantais !
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F
Tu n'as pas une bien belle image de moi, où bien est-ce pour me faire réagir, comme dans un temps pas très ancien ?<br /> Hé bien, tant pis, je ne me débarbouillerai pas ! J'en reprends ...
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M
Les frites, ça se mange avec des moules, ou bien ça se trempe dans du ketchup…<br /> T'es-tu bien empiffrée ?<br /> Je t'imagine couronnée de varech, avec frites en bouche, pif en rouge et moules dans les oreilles. Et plus qu'à te… te débarbouiller gentiment, en prenant soin de ne pas te froisser.
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F
Un truc pour moi alors ... A demain !<br /> Pas eu le temps de passer avant, j'étais occupée à manger mes frites.<br /> Bises Michel
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