Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Chronique, virgule
Chronique, virgule
Derniers commentaires
Archives
20 septembre 2008

Les vents : une montée en puissance

latrines
Auschwitz, les latrines   

    Suite du billet précédent

    Les archives de l’Empire ne donnent aucun détail sur le retour de Chochotte à Berlin, mais de nombreux témoins rapportent qu’une longue limousine noire, encadrée de voitures découvertes où bringuebalait du Totenkopf, devait s’immobiliser tous les trois kilomètres. Une silhouette en jaillissait alors, qui se précipitait vers les buissons, s’immobilisait avant de les avoir atteints, s’accroupissait en catastrophe pendant que son escorte, composée d'officiers au visage de béton, se regroupait autour d’elle et, l’arme au poing, l’œil dénué d’expression devant le rempart de ses manteaux ouverts, se regroupait autour d’elle, la protégeant de toute indiscrétion. Pendant ce temps, dans les anciens laboratoires du docteur Mengele, une canule à la main, un pot de chambre à main droite et un étron à gauche, Treblinka exultait : il venait de mettre au point le virus de la chiasse, de le lâcher au cul la garnison.

*

    Ce dérèglement passager, testé avec succès sur les personnes du commandant et de ses invités, en temps normal sans autre conséquence que l’obligation de se soulager plus souvent que d’ordinaire, et en des lieux que la tétanisation des sphincters ne laissait guère le temps de choisir, eut sur le moral de la troupe, sur le maintien des jeunes le doigt sur la couture du pantalon, un effet destructeur.

    Permettez-moi, pour me faire bien comprendre, de prendre le cas d’un Unterscharführer chargé de transmettre à sa troupe les instructions dont on vient de l’accabler. En temps de transit intestinal normal, il distribue deux ou trois coups, retransmet une partie des ordres reçus (redoutant de se trouver démuni, il en garde la majeure partie sous le coude), surveille quelques instants l’exécution desdits, puis s’en va s’enfiler un remontant. Mais dans le cas présent, où la clairvoyance du gradé est grandement perturbée par une pression intestinale des plus invalidantes, les ordres ne parviennent au troupier qu’à travers la porte des gogues, s’accompagnant comme de juste d’une succession de froissements, grognements, soupirs et autres manifestations de plaisir que la décence interdit de rapporter mais qui, additionnés, entament en profondeur le respect dû au chef. Rien de plus hilarant en effet, ni de plus déstabilisant pour le troufion de base que de savoir son supérieur le cul au-dessus de la fosse, les yeux embués tandis que se maculent sur des chiottes à la turque le bas de son pantalon, ses bretelles et ses bottes. Et pour peu que le lampiste, soumis aux mêmes tracas que sa hiérarchie, se voie contraint de se hâter vers le lieu d’aisance le plus proche (en général les latrines des détenus), d’y faire la queue avant d’y accéder, le plus souvent quelques secondes trop tard, on devine sans peine ce que deviennent les ordres. Quant au bidasse des bas-fonds de Schmollberk, en général mal aimé, mal soigné, nourri de bas morceaux favorisant la prolifération de polypes, je vous laisse deviner avec quel enthousiasme il accepte la discipline.

    C’est dans cette ambiance que les Bibelforcherines, qui devaient passer au four sur décision d’on ne sait qui, et pour on ne sait quelle raison, sur un coup de tête furent reléguées au “Kanada“, dépotoir gigantesque où s’entassaient les centaines de milliers de valises, les centaines de milliers de lorgnons et de paires de chaussures ayant appartenu aux centaines de milliers de gazés, et purent à loisir, en triant les bagages de centaines de milliers de bienheureux rappelés par le Seigneur, reprendre leurs cantiques. Le Canada se spiritualisa, devint un haut lieu de la foi, fut fréquenté le dimanche par des S.S. autrefois pratiquants, devenus entre temps agnostiques mais qui, rendus inquiets par les nouvelles en provenance de l’Est, venaient à visage découvert, le plus souvent en civil, y accomplir génuflexions et signes de croix, prier le ciel de retarder les Russes. Il paraît même que furent découvertes, enfouies dans la partie réservée aux effets féminins, des bottes et des tenues d’officiers supérieurs — preuve s’il en est que certains gradés de haut vol, descendus de leurs nuages pour fuir le bolchevisme, n’avaient pas craint de se travestir en bonnes femmes et de feindre la cloque, de s'encombrer de gnards, de pousser des landaus sur les routes encombrées, défoncées et merdeuses du retour au Moyen Age.

    Plus qu’une déroute, c’est un naufrage qui s’annonçait, le drame du Titanic à l’échelle d’une nation, l’iceberg stalinien décroché de sa banquise pour débarquer en pleine défécation, créer dans les bureaux… etc, etc…
    — …dites, vous ne trouvez qu’il vaut mieux que j’arrête là ?

   

Auschwitz Karnaval - extrait

Publicité
Commentaires
M
Pourquoi de nouveau les yeux fermés ? Ce n'est pas si terrible, ma Vava : une simple histoire de caca boudin, très enfantine, très puérile, dont je livrerai la suite lundi.
Répondre
F
Je ne fais que passer, toujours les yeux fermés.<br /> Toujours un gros bisou Michel
Répondre
B
> Michel<br /> Je te trouve tout de même bien ingrat avec Line Renaud, qu'est-ce qu'elle ta fait sa kabane?<br /> Ciel! La banalisation reprend chez moi du terrain.
Répondre
B
Je crois plutôt que nous serions rattrapés par les évènements.
Répondre
P
Ben non, ne t'arrête pas là !<br /> C'est chiadé comme saga...<br /> <br /> Les botte-chéviques vont marcher dans la merde du pied gauche (en s'essuyant sur le paillasson polonais)<br /> <br /> Bonne journée Michel
Répondre
Publicité
Chronique, virgule
Newsletter
Publicité