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20 avril 2009

Jour de baptême

cochon_1


    Ce samedi, Mimi se lève à huit heures. Petit déjeuner, coup de peigne, voiture, notaire. Il repasse chez lui à 9h30, récupère le matériel nécessaire à une matinée de militantisme, puis s’en va au marché de Toucy rejoindre la camarade Nathalie. Café, partage du matériel de propagande et c’est parti : distribution de tracts Front de Gauche, puis de Tracts PCF quand les premiers sont épuisés, aux gens venus remplir leurs cabas ou simplement se montrer et profiter du monde. Des pépères, des mémères, des petits, des grands, des ras-le-gazon, des bien en chair, des bérets, des fichus, des boiteux, des têtes vides, des casquettes, des hippies, des veaux, des gazelles…

    Pour Mimi, question tract, c’est le baptême du feu. Cependant, après quelques hésitations et maladresses, il a tôt fait de se saisir d’une technique infaillible : repérer la cible, la fixer d’un air engageant, lui tendre le papier d’un geste généreux, lui sourire, et bonne journée si c’est une vielle dame, à lire attentivement si le gars fait la moue, enfin  je vous le mets sur les carottes dans le cas où la citoyenne, entourée de marmots, a de surcroît les mains enchaînées aux légumes…

    Des centaines de visages on ne peut plus ordinaires, et dont certains repassent au gré de leur errance parmi les étals de produits régionaux — alors clin d’œil complice, tenez, je vous  ai gardé celui-ci.

    Mais le plus touchant, pour Mimi, observateur finaud de la vie quotidienne, ce ne sont pas les visages, façonnés dans des moules niant les différences sociales. Ce sont le mains. Les mains qui s’ouvrent, se portent en avant et se saisissent du papier. Pour la plupart des mains d’ouvriers, de paysans, de petites gens qui ont trimé pour s’offrir ce samedi de repos, de retrouvailles entre copains, de tournées d’apéros au Café de la Place : des mains calleuses, ridées par le turbin, qui ne parviennent à s’ouvrir complètement tant les modèle le souvenir de l’outil, tant continue de les hanter la forme de son manche.

    Malgré trois saisons de jardinage, les mains de Mimi, quand à elles, sont des mains de plaisantin — enfin… d’intello. A peine un soupçon de corne à la jointure des phalanges et de la paume.

    Et Mimi de se demander comment les paluches du bon peuple, si grossières, ont bien pu pactiser avec les poules,  soigner es lapins et cochons,  récolter le nectar des abeilles.

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Commentaires
K
Bien beau texte...lueur d'espoir aussi , nous en avons tous bien besoin.
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G
Le Peuple français s'est déclaré libre, voilà peut-être la plus importante différence politique avec les Américains ; eux, chaque individu se déclare libre, et ils confondent liberté avec individualisme. L'addition des individualismes peut constituer une grande force économique ou militaire... pendant un temps, et mener à la crise actuelle et à des guerres sans fin.<br /> <br /> Bref, il faut lire Evo Morales, ce que je ferai aujourd'hui.
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M
Beau commentaire, mon ami, et tes pensées sont les miennes. J'ajouterai simplement ceci : en 1791, décapitant son roi (son père au sens freudien), le peuple français s'est déclaré libre, responsable de lui-même, apte a tracer sa propre voie et définir sa propre éthique.<br /> Les américains, en revanche, ont souvent fui l'Europe où ils vivaient misérables, ont éliminé plus démunis qu'eux pour conquérir leur nation. Seulement, la fuite n'est pas libératrice. Elle enchaîne au contraire à un passé que l'on veut nier, mais qui ressortira.<br /> Le prolétariat américain tel que tu le décris me fait penser à un certain "lumpen prolétariat" que nous avons connu nous aussi, à une époque qui me semble en partie révolue.
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M
Cloudy ma petite, ma grande, ma chère…<br /> Jean-Luc Mélenchon a dit : "militer, c'est se construire soi-même, militer, c'est être libre." <br /> Alors n'abandonne pas, Cloudy. les petits ruisseaux font les grandes rivières, les individus comme nous font la force du peuple.
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C
Ce billet, moi, j'en fais mon miel.
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