le lézard (suite et fin)
Mais voilà qu'un lézard, justement, sortait de la fissure d'un rocher…
Je l'ai regardé et, en esprit, je suis entré dans sa tête pour savoir s'il était content.
Content ? Pas content ? Le lézard n'en sait rien. Le lézard ne sait même pas qu'il est un lézard. Le lézard ignore tout de lui-même. Quand il voit son reflet dans le miroir de la rivière, il croit se trouver devant un autre lézard. Il prend ses jambes à son cou et s'enfuit.
Donc, le lézard n'est ni content, ni mécontent. Ni heureux, ni malheureux. Il ne pleure ni ne rit. Simplement, il a faim ou pas faim. Quant il a faim, il sort chercher sa nourriture. Et quant il n'a pas faim, il reste dans son trou, à attendre.
A attendre quoi ? A attendre d'avoir faim. Mais cela, il ne le sait pas lui-même.
Pareil pour les poissons, même chose pour les libellules et les coccinelles. La même absence d'esprit chez tous les animaux.
Mais j'ai découvert autre chose, dans la tête du lézard. Une obsession qui ne le poursuit jour et nuit : la peur d'être mangé.
extrait de "discours aux enfants", page 28