Rien n'arrête les requins

Vu Margin call. Remarquable fiction, qui vous transporte au cœur d’une banque d’investissement de la taille de Lehman Brothers à la veille de son effondrement. Les “limites historiques de l'indice de volatilité“ sont dépassées depuis quinze jours et, comme le déclare son boss (Jeremy Irons) : On se retrouve avec le plus grand sac d'excréments de l'histoire du capitalisme. » Sitôt les vérifications faites, se pose un roblème à résoudre dare-dare : que faire ? Pour un état major habitué à raisonner à la vitesse de la lumière, et sans qu’aucun sentiment ne puisse perturber la logique, une nuit suffira à le déterminer : fourguer le contenu du sac avant que la panique ne se répande partout, c’est-à-dire sur le champ…

Au petit matin, ne reste qu’à constituer des lots et appeler les clients habituels (épargnants petits et gros, investisseurs, gestionnaires de fortunes, banques d’affaires, etc.), à leur vendre le fumier sans leur dire que c’en est. En deux heures ce sera fait.

Ce film, véritable démonstration mathématique, contient en lui toutes les études possibles sur le capitalisme et le néolibéralisme. À la fois inquiétant, exaltant, à vomir, il est à conserver dans la mémoire. Ne jamais l’oublier.

De retour à mon ordinateur, toujours sous le choc, je fais un tour du côté de La Chronique Agora. Il s’agit d’un site de petits investisseurs (comme de juste, le terme de petits n’est pas formulé) entendant bien ne plus se faire gruger.

L’argumentaire d'Agora débute par une analyse, dans le style gauche de la gauche, de la situation actuelle et de la dette des États. On ne peut qu’approuver, passer au chapitre suivant, y découvrir avec stupéfaction que ce seront les citoyens, vous et moi, les dindons de la farce. Sur cette affirmation décoiffante, on ne saurait quitter le site. Poursuivant donc en lecture rapide, on arrive à la conclusion qui s’impose : N’attendons plus, protégeons-nous de la faillite des États, n’investissons surtout ni dans le pétrole, ni dans le gaz, dont les réserves s’épuisent, ni dans les entreprises occidentales, pour la plupart en mauvais état. Investissons plutôt dans le tiers-monde, dans les pays émergeants bénéficiant d’une croissance annuelle de 7, 10, voire 15 ou 20%. Pour ce faire, inutile de nous rendre au Zimbabwe, en Uruguay ou au à Madagascar. Il nous suffit de nous adresser à Carmignac Investissement Lattitude, qui a tout prévu. Car monsieur Carmignac, assisté de spécialistes de la conjoncture, de fins connaisseurs du marché, d’économistes de métier, nous promet des profits substantiels. En effet, il ne placera pas notre capital dans n’importe quel sac troué— pas tombé de la dernière pluie, le gars — mais dans des valeurs qui ne pourront que grimper : dans les matières premières indispensables à l’industrie, (cuivre, uranium, manganèse, cobalt),  mais aussi dans l’or et, sentant le vent venir, dans les produits agricoles, céréaliers en particulier.

Pauvres petits porteurs, pauvres victimes du prochain krach boursier, de la famine ou de la guerre en gestation, ou de la future révolution ! Et pauvres gamins africains, exploités par des bijoutiers et des diamantaires qui n'ont que faire de la misère sur laquelle ils s’engraissent. Et pauvre humanité, en route vers sa débâcle ! On se croirait de retour à l’intérieur du sac de Jeremy Irons.

Lequel Irons, pour avoir traversé toutes les crises, sachant donc rebondir, ô combien, prévoit la multiplication de sa fortune à partir des faillites annoncées.

Et voici que je viens d’apprendre que notre Nicolas, oui, notre cher Nicolas Sarkozy, s’apprête à monter à son tour un fonds d’investissement — un fonds domicilié à Londres… Londres ? C’est en effet plus sûr.

en prime,

avec cette précision :

Edouard Carmignac salue ici la politique de Mario Draghi à la BCE. Il précise que Carmignac Gestion, qui avait anticipé la crise grecque, gère 50 milliards d' euros d'actifs. S'agissant du gouvernement Hollande, il  a foi dans les compétences de Michel Sapin. D'autres vidéos sont à visionner sur You Tub

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